Les enfants d'Abraham (II)

 


Abraham et les trois anges, Aert de Gelder (1645-1727)

L’évangile du jour : Jean 8, 51-59

En ce temps-là, Jésus disait aux Juifs : « Amen, amen, je vous le dis : si quelqu’un garde ma parole, jamais il ne verra la mort. » Les Juifs lui dirent : « Maintenant nous savons bien que tu as un démon. Abraham est mort, les prophètes aussi, et toi, tu dis : “Si quelqu’un garde ma parole, il ne connaîtra jamais la mort.” Es-tu donc plus grand que notre père Abraham ? Il est mort, et les prophètes aussi sont morts. Pour qui te prends-tu ? » Jésus répondit : « Si je me glorifie moi-même, ma gloire n’est rien ; c’est mon Père qui me glorifie, lui dont vous dites : “Il est notre Dieu”, alors que vous ne le connaissez pas. Moi, je le connais et, si je dis que je ne le connais pas, je serai comme vous, un menteur. Mais je le connais, et sa parole, je la garde. Abraham votre père a exulté, sachant qu’il verrait mon Jour. Il l’a vu, et il s’est réjoui. » Les Juifs lui dirent alors : « Toi qui n’as pas encore cinquante ans, tu as vu Abraham ! » Jésus leur répondit : « Amen, amen, je vous le dis : avant qu’Abraham fût, moi, JE SUIS. » Alors ils ramassèrent des pierres pour les lui jeter. Mais Jésus, en se cachant, sortit du Temple.

***

Jean conclut ici le chapitre 8. La liturgie nous fait sauter du verset 42 au verset 51, omettant les versets 43 à 50 où Jésus précise de quel père ses interlocuteurs sont les fils : « le diable », « menteur et père du mensonge » (44). En retour ceux-ci accusent Jésus d’être un « Samaritain » et, par deux fois (versets 48 et 52), d’être « possédé par un démon ». C’est dire que l’échange mis en scène par l’évangéliste est de plus en plus tendu, autour de la figure d’Abraham, récurrente dans ce dialogue. 

L'échange est aussi caractéristique du malentendu permanent entre Jésus et ceux qui l'écoutent. La façon qu'il a ici d'écarter la mort du chemin de ceux qui gardent sa parole est incompréhensible tant l'inéluctabilité de la mort est une évidence, qu'on soit un prophète ou qu'on s'appelle Abraham. C'est que le mot mort n'a le même sens pour Jésus, comme lorsque, par exemple, il demande à un candidat-disciple de « laisser les morts enterrer les morts » (Luc 9, 60)

La tension culmine lorsque Jésus affirme sa prééminence chronologique et quasi-ontologique sur Abraham dans un ego eimi = moi je suis, qui lui vaut un nouvel accès de fureur des ioudaioi. Jésus manque encore d’être lapidé comme blasphémateur et Jean va enchaîner cette séquence sur la guérison de l’aveugle-né… un jour de sabbat !

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