Non loin du Royaume

 


L'évangile du jour : Marc 12, 28b-34

En ce temps-là, un scribe s’avança pour demander à Jésus : « Quel est le premier de tous les commandements ? » Jésus lui fit cette réponse : « Voici le premier : Écoute, Israël : le Seigneur notre Dieu est l’unique Seigneur. Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit et de toute ta force. Et voici le second : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Il n’y a pas de commandement plus grand que ceux-là. » Le scribe reprit : « Fort bien, Maître, tu as dit vrai : Dieu est l’Unique et il n’y en a pas d’autre que lui. L’aimer de tout son cœur, de toute son intelligence, de toute sa force, et aimer son prochain comme soi-même, vaut mieux que toute offrande d’holocaustes et de sacrifices. » Jésus, voyant qu’il avait fait une remarque judicieuse, lui dit : « Tu n’es pas loin du royaume de Dieu. » Et personne n’osait plus l’interroger.

***

Dans la série des discussions rugueuses voire hostiles que rapporte Marc, cette rencontre pacifiée avec un scribe, qui a apprécié les réponses faites par Jésus précédemment (Marc 12, 28a), ferait presque tache. L'interrogation, pour une fois, ne recèle aucun piège. Et la réponse de Jésus commence par la prière juive quotidienne par excellence, le Shema Israël, tirée du Deutéronome (Dt 6,4). Brown souligne ce fait étonnant : que des décennies après la naissance du christianisme, on apprenne aux « gentils » à réciter une prière juive.

Une fois encore, Jésus ne laisse pas circonscrire le champ de sa réponse par la question posée. Ainsi, il ne se contente pas de répondre à la question « quel est le premier » ; il ajoute un second commandement qu'on ne lui a pas demandé, l'amour du prochain, pour préciser qu'il n'y en a pas de plus grand que « ces deux-là », ce qui interdit sans doute de penser que l'ordre – premier, second – sous-tendrait une quelconque hiérarchie, préséance, entre les deux. Jésus se méfie des comparatifs.

Ne peut-on voir en filigrane dans cette réponse double l'affirmation selon laquelle il y a bien un premier et un second Testament (Alliance)  à recevoir ensemble, sans qu'aucun des deux ne puisse prévaloir sur l'autre, en écho sans doute à des discussions qui agitaient les premiers « christianoi », et contre notamment l'opinion que développera le théologien Marcion au IIe siècle en suggérant une rupture et l'abandon de l'Ancien Testament, de la première Alliance ?

En reformulant la réponse donnée par Jésus, le scribe, lui, affirme la supériorité de l'amour sur le culte sacrificiel du Temple. Il n'est « pas loin du Royaume », conclut Jésus, dans une formule qui en rappelle une autre, duelle, dans l'évangile de Luc (10, 9) : « le royaume de Dieu s'est approché de vous ».

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