Se contenter des miettes ?

 


L’évangile de jeudi : Marc 7, 24-30

En ce temps-là, Jésus partit et se rendit dans le territoire de Tyr. Il était entré dans une maison, et il ne voulait pas qu’on le sache, mais il ne put rester inaperçu : une femme entendit aussitôt parler de lui ; elle avait une petite fille possédée par un esprit impur ; elle vint se jeter à ses pieds. Cette femme était païenne, syro-phénicienne de naissance, et elle lui demandait d’expulser le démon hors de sa fille. Il lui disait : « Laisse d’abord les enfants se rassasier, car il n’est pas bien de prendre le pain des enfants et de le jeter aux petits chiens. » Mais elle lui répliqua : « Seigneur, les petits chiens, sous la table, mangent bien les miettes des petits enfants ! » Alors il lui dit : « À cause de cette parole, va : le démon est sorti de ta fille. » Elle rentra à la maison, et elle trouva l’enfant étendue sur le lit : le démon était sorti d’elle.

***

Jésus a quitté la Galilée, pour la région de Tyr, non loin de la rive méditerranéenne. Il veut y rester incognito, pour échapper un moment à la pression des foules qui l’enserraient dans les villes du bord de la mer de Galilée. Mais sa réputation de guérisseur-exorciste le suit partout. Dans un premier temps, Jésus se comporte de façon assez déplaisante avec cette femme, une païenne. Il la prend de haut, dirait-on.

C’est encore plus évident dans le parallèle chez Matthieu (15, 21-28) où Jésus commence par faire le sourd puis, comme les disciples intercèdent pour la femme qui leur casse les oreilles, déclare qu’il n’a été envoyé « qu’aux brebis perdues de la maison d’Israël » : la limite ethnique est bien tracée !

Chez Marc, Jésus tente d’éloigner la femme avec une métaphore assez méprisante, où il réaffirme la priorité qu’il entend donner à ses coreligionnaires. La femme ne se vexe ni ne se démonte : filant astucieusement la métaphore de Jésus, elle accepte le sort d’un petit chien qui se contenterait des miettes tombées sous la table. Pour une fois, Jésus est battu au plan rhétorique, on l'imagine sourire et, beau joueur comme toujours quand il reconnaît la foi en sa personne, il exorcise à distance l’enfant, qui est guéri quand sa mère rentre à la maison.

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