« Quand t'avons-nous vu ? »
L'évangile du jour : Matthieu 25, 31-46
En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Quand le Fils de l’homme viendra dans sa gloire, et tous les anges avec lui, alors il siégera sur son trône de gloire. Toutes les nations seront rassemblées devant lui ; il séparera les hommes les uns des autres, comme le berger sépare les brebis des boucs : il placera les brebis à sa droite, et les boucs à gauche.
Juste avant son récit de la
Passion, Matthieu a placé un long discours, le cinquième de son évangile, qu’on
nomme « eschatologique » car il parle de la « fin » ou
plutôt « des fins ». La première est la ruine de Jérusalem, bien
réelle, lorsque la ville est prise par les légions de Titus, le fils de l’empereur
Vespasien et le Temple détruit, en 70. Cette fin-là, contemporaine de la rédaction des évangiles, n’est en quelque sorte que la
répétition de la fin du monde, marqué par des signes cosmiques qui annonceront
l’avènement du Fils du l’Homme en Roi de l’univers et juge suprême des êtres
humains. Ce jugement dernier, Matthieu est le seul évangéliste à le décrire en
ces termes. Il n’y a pas de parallèle à ce texte.
Le Fils de l’Homme est bien aussi
le Fils de Dieu, puisqu’il invoque la figure de son « Père » en s’adressant
aux brebis qu’il a placées à sa droite. Ainsi l’identification de ces deux
figures, qui n’étaient encore que jumelles, est bien accomplie à la fin, le
Fils de l’Homme devenu Roi recouvrant le Fils de Dieu, et le « Père »
étant substitué à « Dieu » Jusqu’à effacer le nom même de Dieu du Royaume
où le Fils règne désormais.
La pointe du texte réside évidemment
dans le nouveau critère sur lequel Jésus fonde le jugement dernier de chacun.
Au chapitre 23, Jésus a dressé un réquisitoire implacable contre les Pharisiens
et leurs scribes, fustigeant leur hypocrisie – ils disent mais ne font pas – et
résumant en sept malédictions – « Malheur à vous… » - les vanités d’une
religion morte d'être formelle, qui fait d’eux des « sépulcres blanchis » (Mt 23,
27), plaçant aux premiers rangs les puissants et les riches.
Le nouveau critère, unique, c’est
la façon dont on aura traité les exclus de la société, celleux qui sont nus,
ont faim, ont soif, sont étrangers ou malades ou emprisonnés. Chacun d’eux était
ce Roi venu à notre rencontre, qui juge aujourd’hui les brebis et les boucs. Ce
critère est à l’évidence totalement a-religieux et même a-thée. Car il n’y a plus
d’autre face du Dieu invisible que celle du frère bien visible dans sa détresse qui doive provoquer notre agir immédiat.
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