« Un semeur sortit pour semer... »

 


 Le semeur au soleil couchant, détail, Vincent Van Gogh (1853-1890),


L’évangile du jour (Marc 4, 1-20)

 Et de nouveau, il se mit à enseigner au bord de la mer. Une foule très nombreuse se rassembla auprès de lui, si bien qu’il monta dans une barque où il s’assit. Il était sur la mer, et toute la foule était près de la mer, sur le rivage.

Il leur enseignait beaucoup de choses en paraboles, et dans son enseignement il leur disait : « Écoutez ! Voici que le semeur sortit pour semer. Comme il semait, du grain est tombé au bord du chemin ; les oiseaux sont venus et ils ont tout mangé. Du grain est tombé aussi sur du sol pierreux, où il n’avait pas beaucoup de terre ; il a levé aussitôt, parce que la terre était peu profonde ; et lorsque le soleil s’est levé, il fut brûlé et, faute de racines, il a séché. Du grain est tombé aussi dans les ronces, les ronces ont poussé, l’ont étouffé, et il n’a pas donné de fruit. Mais d’autres grains sont tombés dans la bonne terre ; ils ont donné du fruit en poussant et en se développant, et ils ont produit trente, soixante, cent, pour un. » Et Jésus disait : « Celui qui a des oreilles pour entendre, qu’il entende ! »

Quand il resta seul, ceux qui étaient autour de lui avec les Douze l’interrogeaient sur les paraboles. Il leur disait : « C’est à vous qu’est donné le mystère du royaume de Dieu ; mais à ceux qui sont dehors, tout se présente sous forme de paraboles. Et ainsi, comme dit le prophète : Ils auront beau regarder de tous leurs yeux, ils ne verront pas ; ils auront beau écouter de toutes leurs oreilles, ils ne comprendront pas ; sinon ils se convertiraient et recevraient le pardon. »

Il leur dit encore : « Vous ne saisissez pas cette parabole ? Alors, comment comprendrez-vous toutes les paraboles ? Le semeur sème la Parole. Il y a ceux qui sont au bord du chemin où la Parole est semée : quand ils l’entendent, Satan vient aussitôt et enlève la Parole semée en eux. Et de même, il y a ceux qui ont reçu la semence dans les endroits pierreux : ceux-là, quand ils entendent la Parole, ils la reçoivent aussitôt avec joie ; mais ils n’ont pas en eux de racine, ce sont les gens d’un moment ; que vienne la détresse ou la persécution à cause de la Parole, ils trébuchent aussitôt. Et il y en a d’autres qui ont reçu la semence dans les ronces : ceux-ci entendent la Parole, mais les soucis du monde, la séduction de la richesse et toutes les autres convoitises les envahissent et étouffent la Parole, qui ne donne pas de fruit. Et il y a ceux qui ont reçu la semence dans la bonne terre : ceux-là entendent la Parole, ils l’accueillent, et ils portent du fruit : trente, soixante, cent, pour un. » 

***

 Le texte inaugure chez Marc une série de paraboles centrées sur les semailles et la croissance de la graine qui illustrent la fécondité variable de la Parole. Il y a un consensus chez les spécialistes du Nouveau Testament pour affirmer que Jésus avait choisi la forme parabolique pour diffuser son enseignement. Il est non moins certain que la rédaction finale de ces paraboles, telles qu’elles nous sont parvenues par les écrits évangéliques, a été influencée par le contexte dans lequel elles ont été rédigées, soit bien après la mort de Jésus, dans un temps où la « Voie » (Ac 9, 2) que suivaient les premières communautés chrétiennes faisait déjà l’objet de persécutions, auxquelles la parabole du semeur fait ici allusion. Ces chrétiens pouvaient relire aussi bien les épreuves qu’ils traversaient que les réussites contrastées de leur mission à la lumière des enseignements du Christ, qui les avaient expérimentées lui-même et anticipées de son vivant. Ils pouvaient aussi s’entre-exhorter à ne pas se décourager, car le retour du Ressuscité était en ce temps-là d'une imminence dont nous avons perdu la conscience collective et individuelle.

L’emploi des paraboles instaure un enseignement à deux vitesses, pourrait-on dire. À « ceux qui sont dehors », l’enveloppe ésotérique, mystérieuse, des images empruntées à la culture agricole des collines de Nazareth où a grandi Jésus ; au premier cercle des disciples, l’interprétation en clair qui fait d’eux des initiés. Jésus utilise la prophétie d’Isaïe (Is 6, 9-10) qui annonçait l’échec du prophète à convertir Juda et qui est citée à plusieurs reprises dans le Nouveau Testament* ; elle fait ici office de prophétie autoréalisée, écho au propre échec des disciples du Christ à convaincre, en leur temps, leurs coreligionnaires.

À celui ou celle qui écoute aujourd'hui cet évangile - qui a « des oreilles pour entendre » - de mesurer quel terreau iel offre personnellement à la réception et aux développements  en son for intérieur du « Verbe qui s'est fait chair et qui a demeuré parmi nous » (Jean 1, 14).

* par exemple : Rm 11, 7-8 ;Ac 28, 26-27 ; Jn 12, 37-40.

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