Le permis et le défendu
L’évangile du jour : Marc 3, 1-6
En ce temps-là, Jésus entra de nouveau dans une synagogue ; il y avait là un homme dont la main était desséchée. Ils épiaient Jésus pour voir s’il le guérirait le jour du sabbat afin de pouvoir l’accuser. Il dit à l’homme qui avait la main desséchée : « Lève-toi, viens au milieu. » Et s’adressant aux autres : « Est-il permis, le jour du sabbat, de faire du bien plutôt que du mal ? de sauver une vie plutôt que de la tuer ? » Mais eux se taisaient. Alors, les regardant à la ronde avec colère, navré de l’endurcissement de leurs cœurs, il dit à l’homme : « Étends la main. » Il l’étendit, et sa main redevint normale.
Une fois
sortis, les pharisiens se réunirent en conseil avec les partisans d’Hérode
contre Jésus, en vue de le perdre.
***
Dès le début,
Jésus est sous surveillance. Certains l’observent pour pouvoir l’accuser. Se
voient déjà en témoins à son procès, qu’ils commencent à instruire. Va-t-il
encore violer le sabbat ? Et Jésus sait, de questions en interpellations,
quels regards sont posés sur lui. Il est perpétuellement attendu au tournant
et sa vie ne cesse de tourner, de virevolter, d’annonces du royaume en
guérisons. Alors cette fois, plutôt que de guérir cet homme dans un coin sombre
de la synagogue, en catimini, il le met au centre, « au milieu » du
monde, dans la lumière, pour poser LA question qui tourmente ses
contradicteurs, obsédés par le permis et le défendu. Il la déplace, de la
lettre de la Loi, vers son sens, sa visée : faire le bien, sauver une vie.
Ce qui importe n’est pas le couple infernal et figé du permis et du défendu mais
celui, aux frontières plus incertaines, du bien et du mal. Il déplace la question
de sorte qu’il n’y ait qu’une réponse possible : le bien, la vie, qui soit
acquiescement à la guérison qu’il s’apprête à accomplir. Le silence de ses
contradicteurs vaut rejet, à nouveau, de ce qu’il va faire, du déplacement qu’il
a tenté d’opérer dans leurs esprits et dans leurs cœurs « endurcis ».
Et ce silence dans lequel il les a enfermés quasi logiquement les rend encore
plus furieux contre lui, de l’être contre eux-mêmes. Accepteront-ils un
jour la liberté intérieure que Jésus veut rendre aux humains ?
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