La Madeleine
L’évangile de ce jour (Jean 20, 1.11-18) (sainte du jour : Marie-Madeleine)
Or, le premier jour de la semaine, Marie de Magdala vient au tombeau tôt, comme il faisait encore sombre et elle voit la pierre enlevée du tombeau. Or Marie se tenait près du tombeau, -dehors, et pleurait. Comme elle pleurait, elle se pencha dans le tombeau et elle voit deux anges en blanc, assis l’un à la tête et l’autre aux pieds, où gisait le corps de Jésus. Et eux lui disent : « Femme, pourquoi pleures-tu ? » Elle leur dit : « Ils ont enlevé mon Seigneur, et je ne sais pas où ils l’ont déposé. » Ayant dit cela, elle se retourna en arrière et elle voit Jésus debout, et elle ne savait pas que c’était Jésus. Jésus lui dit : « Femme, pourquoi pleures-tu ? Qui cherches-tu ? » Elle, pensant que c’était le jardinier, lui dit : « Seigneur, si tu l’as emporté, dis-moi où tu l’as déposé, et moi, j’irai le prendre. » Jésus lui dit : « Mariam. » Se retournant, elle lui dit en hébreu : « Rabbouni ! », ce qui veut dire : « Maître ! ». Jésus lui dit : « Ne me touche plus, car je ne suis pas encore monté vers le Père mais va vers les frères et dis-leur :’ je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu.’ » Marie de Magdala vient, annonçant aux disciples : « J’ai vu le Seigneur », et qu’il lui a dit cela.
(traduction au plus près du texte grec : synopse de Benoît et Boismard)
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C’est sans doute la mise en scène la plus intimiste et la plus « glamour » de la résurrection dans les évangiles : la rencontre avec un jardinier nommé Jésus. La figure de Marie Madeleine doit beaucoup de sa légende dorée à Jacques de Voragine. À Dammarie-en-Puisaye, tout près de chez moi, il y a une église où un curé artiste, l’abbé Gallerand, a peint dans les années 30 l’histoire de « la Madeleine » inspirée par le chroniqueur italien du XIIIe siècle, en douze immenses panneaux qui couvrent les deux bas-côtés de la nef. C’est à la fois kitsch, sulpicien et infiniment admirable. Pierre-Emmanuel Dauzat a consacré un petit livre, aussi stimulant que son « Suicide du Christ », à « L’invention de Marie-Madeleine » (Bayard éditions), où il traque dans les Écritures et l’histoire de leur réception les figures tantôt disjointes tantôt superposées de trois Marie (en sus de la mère de Jésus) : la pécheresse adultère, la femme aux sept démons, la sœur de Marthe et Lazare aux pieds du Maître. Ici, l’irremplaçable Jean fait preuve une nouvelle fois de sa précision, de son apparent prosaïsme et de son goût permanent pour le quiproquo, qui culminent dans le fameux « noli me tangere », « ne me touche plus ». Un bref moment, les disciples incrédules ne sauront quoi faire de ce témoin aussi encombrant qu’illégitime : une femme, qui aurait vu le Seigneur, mort trois jours auparavant, pensez donc ! Avant d’entrer eux-mêmes dans cette vision, invités à leur tour par le Christ en personne. Mais nous, croirons-nous un jour, sans l'avoir vu ?
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